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L’architecture est une solution aux crises actuelles.

Wednesday the 19th of October 2022

L’architecture est une solution aux crises actuelles.

Dans cet article, Christine Leconte, présidente du Conseil national de l’Ordre des architectes, expose les engagements écologiques et sociaux de l’ensemble de la profession. Elle nous alerte sur le risque de perte du contact avec le territoire et nous encourage à nous reconnecter avec ce qui nous entoure.

Christine Leconte, vous êtes présidente du Conseil national de l’Ordre des architectes. Selon vous, l’Ordre des architectes intègre-t-il totalement au sein de son fonctionnement la régénération écologique et climatique ?

Christine LECONTE - L'architecture doit être considérée comme une solution face aux crises actuelles. Ces dernières, notamment celle du réchauffement climatique, tendent à révolutionner nos pratiques et les manières de penser notre métier. Ainsi il faut à la fois réduire drastiquement notre empreinte carbone mais également adapter nos villes aux changements climatiques déjà en cours. Cette problématique est centrale dans notre action. Le plaidoyer que nous avons rédigé permet de remplir notre devoir de conseil vis-à-vis des pouvoirs publics que nous devons d'alerter sur les impacts d'une urbanisation non maîtrisée sur la qualité de vie de nos concitoyens. Nous y proposons 16 mesures pour répondre aux enjeux actuels. Le mouvement des gilets jaunes et le confinement ont révélé à tous les liens intrinsèques qui existent entre architecture et conditions de vie, nous ne pouvons plus faire semblant de ne pas savoir l’impact qu’à la construction de nos villes aujourd’hui. Ainsi, pour répondre à la question Comment l'être humain peut-il vivre dans nos espaces urbains au XXIe siècle, nous répondons qu’il faut apprendre à « ménager » le territoire.

Quelle formation reçoivent les jeunes architectes à ce sujet ? Que préconise le Conseil national de l’Ordre ?

En France, L’ensemble des Écoles nationales supérieure d’architecture a pris à bras le corps la question de la formation aux enjeux écologiques. De plus en plus d’ateliers de projets intègrent, dès la première année, la question du recyclage de l’existant, du patrimoine. Les enseignants développent également la démarche du « designbuild » afin d’ancrer l’apprentissage des étudiants au plus près de la question spatiale et constructive. De plus, depuis plusieurs années, un réseau inter écoles, appelé ENSAECO favorise le partage d’expériences entre les enseignants-chercheurs pour que nos futurs architectes reçoivent la meilleure formation possible et notamment pour concevoir en réhabilitant. De nouvelles formations post diplôme permettent d’acquérir plus de compétences, après le diplôme. C’est le cas du DPEA de l’ENSA Versailles « Transformation écologique des constructions du XXe siècle » : une formation universitaire post-master portant sur la réhabilitation des constructions du XXe au regard de la crise énergétique et environnementale actuelle.

Lors de grands projets architecturaux, commandés par des acteurs publics ou privés décisionnaires, incluent-ils spontanément et suffisamment la préservation de l’environnement (en plus du cadre de la loi) ?

Ce n’est pas toujours aussi évident. Au niveau de la construction, nous avons encore le réflexe de « démolir » avant de « construire ». Il faut massivement réhabiliter. Chaque bâtiment est une ressource. Et nous savons aujourd’hui que la démolition consomme en moyenne 5 fois plus de GES et 70 fois plus de matières premières… Néanmoins, nous cherchons à accompagner les acteurs publics dans ce sens car il faut changer de logiciel constructif. Nous montrons que c’est possible. C’est la même chose pour l’aménagement. Il faut que nous composions avec les nouvelles donnes : aléas climatiques, submersion marine… l’architecture des risques majeurs est devenue un axe de travail à part entière que nous essayons de partager avec le plus grand nombre.

Depuis plusieurs années, vous prônez une démarche d'aménagement basée sur la "réparation de la ville". En quoi consiste réellement cette démarche ?

Il faut désormais penser une ville qui réponde à ces trois crises : celle des ressources de la planète, celle de l’adaptation au changement climatique et celle de la biodiversité. L’un des enjeux est de réduire drastiquement nos émissions de GES provenant de nos villes. Or, 80 % de la ville qui existera en 2050 est déjà construite : une partie de nos consommations d’énergie provient de cet existant. En réalité, la ville du futur, c'est celle d'aujourd'hui, le tissu urbain ne se renouvelant que de 1 % par an. D'ici à 2050, il y a donc 20 % à construire et 80 % des villes à retravailler, notamment pour les adapter aux défis qui nous attendent. Il faut donc partir de la ville existante et voir comment l’améliorer et mieux faire : apprendre à considérer l’existant, à le réparer. On ne doit plus penser la ville comme on l’a pensée jusqu’ici. C’est la fin de la ville facile, celle qui s’étale, qui démolit et reconstruit, qui ne prend pas en compte l’existant, qui se fabrique à l’« opportunité ». La ville individualisée, zonée. Nous voyons bien que la ville d’aujourd’hui ne correspond plus toujours à nos usages. Pour les 20 % qu’il y a à construire, il faut une ville qui protège, à la fois, la planète et ses habitants, en tenant compte de leurs aspirations. C’est la réflexion hybride typique de l’architecte. C’est un choc culturel que nous subissons : comment faire évoluer nos modes de vie pour ne pas subir les crises ? Réparer la ville, c’est aussi passer de la ville individualisée à la ville partagée. Au moment où l’on s’interroge sur la façon dont va se faire la zéro artificialisation nette, il faut regarder ce dont on dispose déjà et réfléchir à comment faire avec l’existant. La densité fait peur mais il existe de nombreuses typologies urbaines et architecturales qui ne sont pas utilisées aujourd'hui. Cela constitue un travail méticuleux de création architecturale pour apporter le meilleur aux habitants en relevant les défis du siècle ! L’objectif, c’est plus de proximité et moins de promiscuité. Quand nous disons « réparons la ville ! », avec un point d’exclamation, c’est une forme de pensée positive : à partir de cela, on peut formidablement construire.

Vous interviendrez le 25 novembre prochain à l’UNESCO, à l’occasion de l’Université de la terre, sur le thème « Bâtir des villes désirables et vivables ». Pensez-vous que la mise en place de ‘’la grande ville durable’’ est concrètement possible ? Si oui comment ?

Je ne sais pas ce que veut dire « Grande ville durable » exactement. Attention aux mots valises que nous employons. Je parlerais plutôt d’écosystèmes, de biorégions. Si l’on perd le contact avec le territoire, le défi est perdu. Le climat, les matériaux, l’histoire du lieu, l’eau : l’enjeu de notre siècle est de se reconnecter avec ce qui nous entoure, pour mieux vivre avec lui. Ne pas lui demander plus que ce qu’il peut nous apporter. Il ne s’agit pas de « préserver la nature » comme on peut le lire parfois, mais de se rappeler que c’est elle qui – à terme- nous préservera ! Lutter contre ne fonctionne pas, nous l’avons assez fait au XXème siècle… il faut aller dans son sens car nous faisons partie d’un tout. Ce qui nous attend si nous continuons comme nous le faisons actuellement, c’est que nous allons droit dans le mur : nous prévoyons 4 fois plus de clim en 2050 qui réchaufferons encore plus la planète, et les émissions de GES dûes au béton vont doubler en 10… Sans cette prise de conscience, il est possible que nous ne relevions pas notre plus grand défi : offrir des espaces de vie à tous. Il n’est pas question de laisser les plus faibles, les plus démunis au bord de la route. C’est une question d’humanité, c’est la question de l’architecture aujourd’hui.

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